Une découverte sherbrookoise issue de la recherche fondamentale permet d’envisager des traitements plus efficaces contre le cancer du pancréas, dont le taux de mortalité n’a pas diminué depuis 20 ans. Cette avancée est née dans le laboratoire de Marie-Josée Boucher, professeure-chercheuse à l’Institut de recherche sur le cancer de l’Université de Sherbrooke (IRCUS).
Cette percée scientifique plus qu’attendue permettrait de combiner deux stratégies thérapeutiques, la gemcitabine et le TFEB, pour réduire la résistance aux traitements de chimiothérapie.
Augmenter la réponse à la chimiothérapie
Traiter les cellules cancéreuses du pancréas avec un agent chimiothérapeutique standard, la gemcitabine, tout en bloquant la fonction du facteur de transcription EB (TFEB) serait une stratégie prometteuse. En effet, les efforts de la professeure Boucher et de son équipe ont permis de démontrer que la gemcitabine a besoin de TFEB pour activer la fonction des lysosomes dans les cellules cancéreuses pancréatiques, et qu’en le ciblant, les cellules deviennent plus vulnérables au traitement.
La combinaison de ces deux traitements permet de réduire de façon remarquable non seulement la croissance des cellules cancéreuses pancréatiques, mais également leur capacité à développer des tumeurs.
Ces résultats ont d’ailleurs fait l’objet d’un article publié dans la revue Cell Death Discovery avec deux autres membres professeurs-chercheurs de l’IRCUS, Steve Jean et Lee-Hwa Tai.
Pour les patientes et patients atteints d’un cancer du pancréas, la résistance à la chimiothérapie reste un enjeu. Comme les stratégies thérapeutiques combinées peuvent réduire la résistance aux traitements, et que les facteurs de transcription peuvent maintenant être ciblés par un médicament, il va sans dire que le TFEB mérite une attention considérable.
Cette découverte est une première étape. Des expériences de validation précliniques seront essentielles. Il sera aussi intéressant de tester si cibler le TFEB peut également augmenter la réponse des cellules cancéreuses pancréatiques à d’autres agents chimiothérapeutiques utilisés en clinique.
Marie-Josée Boucher, professeure-chercheuse à l’IRCUS
De plus, alors que plusieurs causes ont été liées à cette résistance, les recherches des dernières années, y compris celles menées par la professeure Boucher, ont permis de démontrer que l’autophagie y joue un rôle important.
Qu’est-ce que l’autophagie et la fonction des lysosomes?
L’autophagie est un processus normal utilisé par les cellules saines du corps pour faire le ménage, mais aussi pour survivre lors d’un stress. La cellule rassemble « ses déchets », le matériel dont elle n’a plus besoin, et les dirige dans des petits sacs appelés lysosomes. Les lysosomes ont comme fonction de dégrader et recycler ce matériel afin de fournir à la cellule ce dont elle a besoin pour assurer sa survie.
Les cellules cancéreuses utilisent à leur avantage l’autophagie pour résister au stress provoqué par les traitements anticancéreux et éviter la mort. Les dernières étapes de l’autophagie nécessitent la présence d’un réseau de lysosomes fonctionnels.
Le TFEB joue un rôle central dans la régulation de l’autophagie et la formation des lysosomes.
La recherche pour augmenter le taux de survie
Année après année, le cancer du pancréas montre l’un des plus faibles taux de survie. Les statistiques canadiennes 2023 estiment que 1 personne sur 68, soit 1,5 % de la population, décèdera du cancer du pancréas. Ces statistiques mettent en lumière le grand impact que cette découverte pourrait avoir.
Nous utilisons encore souvent la gemcitabine pour traiter le cancer du pancréas. Le fait de trouver une cible potentielle qui augmenterait l’efficacité de la gemcitabine est clairement intéressant du point de vue clinique. Malgré plusieurs protocoles de recherche et de nombreux efforts scientifiques, les traitements pour le cancer du pancréas avancé ont peu changé depuis les dernières années. Le taux de survie demeure beaucoup trop faible. La recherche fondamentale est essentielle.
Frédéric Lemay, gastroentérologue-oncologue au CIUSSS de l’Estrie-CHUS et professeur-chercheur à l’IRCUS
Une chercheuse passionnée par la complexité du cancer du pancréas
Les recherches de la professeure Boucher, entièrement consacrées au cancer du pancréas depuis plus de 15 ans, se consacrent à l’identification des signaux de communication favorisant la multiplication et la survie des cellules cancéreuses du pancréas.
La recherche fondamentale est essentielle pour l’amélioration de la survie quel que soit le type de cancer, car elle permet de comprendre comment les cellules cancéreuses réagissent aux traitements, et quelles stratégies adopter pour augmenter l’efficacité de ces derniers
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